Sensibilisation interne

Burn-out : comment prévenir l’épuisement de votre équipe informatique ?

Temps de lecture: 14 minutes

La directrice des ressources humaines d’ESET insiste sur l’importance de la conversation et de l’ouverture d’esprit. En raison de la pénurie de talents dans le domaine de la cybersécurité, le recrutement d’experts en informatique est devenu un défi pour de nombreuses entreprises. Dans de nombreux cas, l’équipe informatique doit gérer des charges de travail excessives. Cette situation, ainsi que d’autres facteurs tels que l’insuffisance des budgets, le besoin constant de suivre les nouvelles tendances et le manque de confiance dans la direction de l’entreprise, font partie des raisons les plus courantes de l’épuisement professionnel dans le secteur des technologies de l’information.

Comment ne pas perdre de précieux talents et veiller à ce que vos experts en cybersécurité soient motivés pour protéger votre entreprise ? Jana Hoang, Director of Global People Knowledge and Expertise chez ESET, a partagé quelques idées et conseils à des fins de prévention et pour résoudre les problèmes.


Le saviez-vous ? 

Selon le Forum économique mondial, il manquait 3,4 millions de travailleurs dans le domaine de la cybersécurité en février 2023. Environ 59 % des cadres dirigeants et 64 % des dirigeants informatiques considèrent le recrutement et la fidélisation des talents comme un défi majeur pour la gestion de la cyber-résilience.

La crise du COVID comme déclencheur de l’épuisement 


Outre les raisons susmentionnées, il existe selon Mme Hoang un autre facteur qui a considérablement affecté la santé mentale de nombreux professionnels de l’informatique : la crise du coronavirus. « Au tout début de la pandémie, peu de personnes étaient prêtes à travailler depuis leur domicile à temps plein. Les responsables informatiques ont dû faire de leur mieux pour fournir aux collaborateurs tout l’équipement nécessaire leur permettant de télétravailler en toute sécurité. Le niveau de stress et la charge de travail ont augmenté de manière significative, » explique la professionnelle des ressources humaines.

Pour une entreprise qui travaille dans le domaine de la cybersécurité, la pression et les exigences de protection des lieux de travail sont beaucoup plus fortes. De plus, en passant à un modèle de travail exclusivement à distance, de nombreux spécialistes informatiques ont dû augmenter considérablement leur charge de travail. « Ils avaient tendance à oublier de faire des pauses, même s’il s’agissait d’une courte pause pour s’étirer, prendre un café ou manger. Certains de nos informaticiens passaient continuellement d’une réunion en ligne à l’autre. Pas d’échange avec leurs collègues, juste du travail non-stop. Ils ont commencé à avoir des difficultés à dormir, pensant au travail toute la nuit. Leurs performances ont peut-être augmenté, mais le risque d’épuisement professionnel aussi, » explique Mme Hoang. Une situation similaire s’est produite dans d’autres segments de l’entreprise.

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Premiers signes d’épuisement  

Comment reconnaître l’apparition de l’épuisement professionnel ? Une personne commence par exemple à avoir des difficultés à se motiver, ou fait preuve d’indifférence et de cynisme. « Les personnes qui apportaient habituellement de nouvelles idées et étaient optimistes ont soudainement adopté une approche plus passive. Ils participaient silencieusement aux réunions ou n’y venaient plus du tout. Parfois, ils commençaient également à critiquer excessivement tout ce qui se passait, en disant "Pourquoi devrions-nous le faire ? Cela ne sert à rien", ou en abandonnant sans même essayer, » déclare Mme Hoang. Les collaborateurs souffrant d’épuisement professionnel cessent d’accomplir leur travail avec passion et peuvent même devenir irresponsables, ce qui se traduit souvent par une détérioration des résultats.

Dans les cas extrêmes, lorsque les signes de l’épuisement professionnel sont sous-estimés ou non identifiés, il arrive un jour où le collaborateur concerné ne se présente plus au travail, et n’y revient même jamais. Comme le souligne Jana Hoang, « à un certain moment, le corps dit qu’il en a assez et s’arrête, comme pour tout autre problème de santé. » 

L’intensité de l’épuisement varie en fonction de sa gravité. Une consultation avec un psychologue ou un thérapeute peut aider la personne à identifier les facteurs de stress et définir les prochaines étapes. « Dans certains cas, lorsque les signes sont plutôt légers, il peut être utile de réduire la charge de travail, redéfinir les priorités, augmenter les effectifs ou expliquer le sens des tâches. Essayez de clarifier pourquoi leur travail est important pour l’ensemble de l’entreprise, afin qu’ils puissent voir l’impact et la situation dans son ensemble. Il est essentiel de savoir sur quoi vous travaillez et pourquoi vous le faites, » souligne la professionnelle des ressources humaines d’ESET.

Si le burnout est plus grave et que la personne est très épuisée, un congé peut s’avérer utile. « Chez ESET, certains des employés concernés se voient offrir un congé sabbatique. Sa durée dépend de l’état et des préférences du collaborateur, mais elle doit aussi être en phase avec les besoins de l’entreprise. La plupart du temps, le congé est de trois mois. Nous recommandons aux collaborateurs de s’abstenir d’utiliser des appareils numériques et de calmer leur esprit en réorientant leur attention vers une activité qui leur fait plaisir, de préférence une activité simple et peu stimulante. Certains d’entre eux décident de faire du travail manuel, par exemple sur un chantier de construction, tandis que d’autres consacrent leurs congés à la peinture ou à la rénovation de leur maison, partent en voyage ou font du bénévolat. La méditation et le rétablissement d’un sommeil sain sont également utiles, » précise Mme Hoang. 

Dans la plupart des cas, le congé sabbatique est bénéfique et l’individu revient bien plus motivé ou avec des compétences nouvellement acquises qui profitent réciproquement à l’entreprise. Dans d’autres cas, le salarié décide de quitter définitivement l’entreprise. « Dans ce dernier cas, nous nous assurons que la porte reste ouverte s’il souhaite revenir chez ESET, » explique Mme Hoang.

Comment aborder la prévention ? Quatre conseils 

1. Développez une culture de la transparence et n’oubliez pas d’y intégrer des conversations

Lorsqu’un administrateur informatique ou un autre professionnel de l’informatique a l’impression de perdre sa passion, il doit se sentir soutenu et savoir qu’il est toujours raisonnable de s’adresser à ses supérieurs. Toutefois, cela ne peut se produire que dans un environnement de travail sain. « Les cadres dirigeants et les managers doivent communiquer avec les membres de leur équipe sur les ressources, les échéances et les problèmes liés à leur métier, mais également trouver le temps de simplement bavarder. Tous les êtres humains ont des problèmes et des rêves qui devraient être partagés à voix haute.  

Une discussion ouverte et décontractée lors d’un déjeuner ou autours d’un café peut révéler beaucoup de choses et mettre en évidence les premiers signes d’épuisement professionnel, » déclare Mme Hoang. Si le manager sent que quelque chose ne va pas au niveau de l’humeur et de la motivation de l’employé, il est préférable d’éviter de convier l’employé à un entretien dans son bureau ou d’envoyer une invitation soudaine sur le calendrier, car cela pourrait causer encore plus de stress.  

Proposer spontanément une pause-café/un déjeuner à l’extérieur des locaux de l’entreprise ou une courte promenade est plus naturel, et aidera l’employé à s’ouvrir et s’exprimer. « Les professionnels de l’informatique ont tendance à être plutôt introvertis. Il est donc utile de les aider à partager leurs sentiments autant que possible. Je compare parfois les managers à des parents. Ils doivent repérer lorsque leurs enfants commencent à agir différemment, sans jamais juger ou rire, même des problèmes qui peuvent sembler les plus absurdes. Plus la relation et la confiance entre le parent et l’enfant sont bonnes, plus leur relation est forte et positive, » résume la directrice des ressources humaines.

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Comment aborder les entretiens avec les salariés 

1. Posez des questions OUVERTES pour susciter une communication plus large et plus profonde. Les questions FERMÉES du type « oui » ou « non » ne vous aident pas suffisamment à comprendre le monde intérieur de votre interlocuteur et peuvent conduire à des suppositions erronées. 

2. Privilégiez le renforcement positif et utilisez des mots positifs plutôt que des mots négatifs. Cela peut contribuer à augmenter les niveaux de sérotonine dans le cerveau. 

3. Orientez la conversation en posant des questions qui amèneront votre interlocuteur à passer du stade de la plainte à celui de la résolution de problèmes

Exemples de questions qui peuvent être posées : 

- Comment vous sentez-vous ces derniers temps ? Qu’est-ce qui vous fait plaisir ?  

- Qu’aimeriez-vous changer ou influencer ?  

- Qu’est-ce qui vous plaît et vous déplaît dans votre poste ? 

- Quels sont les éléments de votre travail que vous trouvez motivants/stimulants/engageants/amusants ? 

- Comment changeriez-vous le champ d’application/les responsabilités de votre travail et comment vous sentiriez-vous ? 

2. Tenez compte de l’individualité 

Si certaines personnes peuvent supporter d’énormes charges de travail et ne jamais souffrir d’épuisement professionnel, d’autres peuvent être beaucoup plus sensibles en raison de prédispositions génétiques. C’est pourquoi il est essentiel d’aborder les employés en respectant leurs traits de personnalité. Ce qui peut convenir à l’un peut ne pas convenir à l’autre. « Si un responsable envoie des emails à 2 heures du matin, il doit faire savoir à ses collègues qu’il n’attend pas d’eux qu’ils fassent de même et que ce n’est pas la norme attendue. Il faut toujours tenir compte des caractères individuels, des antécédents et des conditions, » déclare Jana Hoang.  

Certains facteurs de stress peuvent être liés au travail, d’autres peuvent être d’ordre personnel. Il est avantageux pour tout manager de les connaître tous les deux, et au besoin, de demander de l’aide à la direction générale ou de prendre des mesures d’amélioration du bien-être des employés.

3. Offrez à vos employés un soutien psychologique professionnel 

Les responsables, le département des ressources humaines et les professionnels des ressources humaines devraient apporter leur soutien aux collaborateurs. Un psychologue d’entreprise ou un psychologue partenaire peut être une excellente solution si vous souhaitez offrir à vos collaborateurs une aide professionnelle. Jana Hoang en fournit quelques exemples : « Les salariés d’ESET peuvent bénéficier gratuitement des services d’un psychologue trois fois par an. Nous organisons également régulièrement des ateliers visant à améliorer la santé mentale, les techniques de méditation et la prévention de l’épuisement professionnel. Nous touchons également à la question de la communication, en proposant des webinaires et des sessions de formation qui offrent des conseils sur la manière d’aborder son supérieur et d’ouvrir le dialogue lorsque l’on est épuisé ou que l’on ne se sent pas motivé. Nous proposons également des méthodes pour mieux hiérarchiser les priorités et gérer son temps. Nous partageons régulièrement des contenus inspirants sur la santé mentale, tels que des podcasts et des conférences LinkedIn.  

Malheureusement, de nombreuses personnes se sentent encore mal à l’aise lorsqu’elles doivent s’exprimer et faire part assez tôt de leur malaise, car elles pensent que les autres les jugeront ou les considèreront comme instables ou faibles. Nous voulons faire de notre mieux pour surmonter cette stigmatisation. Même notre esprit/notre moi mental peut tomber malade s’il est trop stimulé ou épuisé, tout comme n’importe quelle partie du corps physique. » 

4. Si possible, n’optez pas pour un travail à distance à 100 % 

Les contacts personnels sont bénéfiques pour la créativité et la santé mentale, car ils activent de nombreuses parties de notre cerveau et de notre système nerveux. « Les personnes qui ne travaillent qu’à distance peuvent facilement manquer l’occasion de s’inspirer de conversations aléatoires ou oublier de faire des pauses. Même une petite conversation dans la cuisine du bureau peut donner un coup de fouet à l’énergie ou aider à identifier les signes de mal-être, » souligne Mme Hoang.  

Il est donc fortement recommandé de combiner télétravail et présence physique sur le lieu de travail. « D’après notre expérience, nos employés finissent tôt ou tard par assimiler ce concept comme meilleur scénario possible, car ils ont alors tendance à venir plus souvent au bureau. Les êtres humains sont naturellement sociables. De temps en temps, nous avons besoin de nous entourer de personnes qui nous font nous sentir bien et qui inspirent notre cerveau à continuer de se développement. Nous avons assurément ces personnes dans notre entreprise, » conclut Jana Hoang.

Jana Hoang, Director of Global People Knowledge and Expertise chez ESET 

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Jana est diplômée en informatique, en anglais et en arts à l’université de Nitra, en Slovaquie. Elle a commencé sa carrière chez ESET en 2008 en tant que généraliste des RH. En 2010, elle a reçu le prix RecruitRank de la meilleure spécialiste des ressources humaines en Slovaquie, décerné par Profesia.sk. Elle s’est ensuite surtout concentrée sur les partenariats de RH et sur le programme de rémunération globale. En 2022, elle est devenue directrice de la connaissance et de l’expertise des personnes, supervisant la rémunération globale, les avantages sociaux, la structure organisationnelle, le développement des talents et l’apprentissage, les communications internes et les événements organisés pour les employés.